Cela fait maintenant plusieurs années que dans un certain village du Midwest, chaque fois que quelqu'un parle de spectacle de Noël, on aurait cité volontiers le nom de Wallace Purling. L'interprétation de Wallace dans une pièce de la Nativité est passée dans la légende. Mais les anciens qui étaient présents dans la salle ce soir-là ne se lassent pas de remémorer ce qui s'est passé dans le moindre détail.
Wallace avait neuf ans et était en CE1 alors qu'il devait être en CM1. Les gens savaient qu'il avait des difficultés à l'école. Il était grand, maladroit, lent en esprit et en geste. Les autres enfants de la classe, qui étaient plus petits que lui, l'aimaient bien, même si parfois ils avaient du mal à cacher leur irritation quand Wallace leur demandait de participer à leur partie de foot ou à n'importe quel autre jeu où il fallait courir vite.
La plupart du temps, ils trouvaient un moyen pour le mettre à l'écart mais Wallace ne se fâchait jamais. Il attendait et regardait patiemment. C'était un garçon très serviable, souriant et plein de bonne volonté et était toujours prêt à porter secours à l'opprimé. Parfois, quand les grands garçons chassaient les petits, Wallace était toujours là pour dire "Ne peuvent-ils pas rester ? ils ne causent pas d'ennui !"
Wallace rêvait de jouer le rôle de berger jouant de la flûte dans le spectacle de Noël cette année-là mais la responsable du spectacle, Miss Lumbard, lui donna un rôle plus important. Après tout, se disait-elle, l'aubergiste n'a pas trop de texte à apprendre, et la grande taille de Wallace donnerait plus de force à son refus d'héberger dans son établissement.
Ainsi ce jour-là un grand nombre d'habitants du village se rassembla autour de l'extravagance annuelle de décor, de houlettes, d'auréoles et d'ânes. Personne, de la scène ou dans les coulisses, n'était plus absorbé par la magie de cette nuit que Wallace. On racontait qu'il suivait le spectacle dans une aile de la scène avec une telle fascination que de temps à autre, miss Lumbard avait besoin de s'assurer qu'il n'allait pas apparaître sur scène avant son tour.
Puis vint le moment où apparaît Joseph soutenant lentement et tendrement Marie jusqu'à la porte de l'auberge. Joseph frappa fortement à la porte en bois fixée sur le décor.
"Que voulez-vous ?" demanda Wallace en ouvrant la porte d'un geste brusque.
"Nous cherchons un chambre".
"Cherchez ailleurs", Wallace regarda droit devant lui mais parla avec force. "Ici c'est complet"
"Monsieur, nous avons demandé partout ailleurs en vain. Nous venons de très loin et nous sommes fatigués"
"Il n'y a plus de chambre pour vous". Wallace avait un air sévère.
"S'il vous plaît Monsieur l'aubergiste, ma femme Marie attend un bébé et elle a besoin d'un endroit pour se reposer. Vous avez sûrement un petit coin d'une pièce pour elle. Elle est vraiment très fatiguée"
Et pour la première fois, l'aubergiste quitta son air froid et distant pour regarder Marie. Puis s'ensuivit une longue pause, suffisamment longue pour susciter un léger sentiment de malaise dans la salle.
"Non, allez-vous en !" chuchota le souffleur caché dans une aile de la scène.
"Non !", répéta machinalement Wallace, "Allez-vous en !!"
Tristement, Joseph entoura Marie de ses bras, qui posa sa tête sur l'épaule de son mari et tous les deux commencèrent à s'en aller. Toutefois, l'aubergiste n'est toujours pas rentré chez lui. Wallace resta sur le seuil de sa porte, regardant le couple s'éloigner.
Sa bouche est restée ouverte, ses sourcils froncés de contrariété, et ses yeux se remplirent de larmes.
Soudainement, ce spectacle de Noël est devenu totalement différent de tous les autres.
"Ne partez pas, Joseph", cria Wallace. "Ramenez Marie ici !". et le visage de Wallace s'illumina d'un large sourire. "Prenez donc ma chambre !"
Quelques personnes du village pensaient que le spectacle a été gâché. Mais il y en a d'autres - beaucoup, beaucoup d'autres - qui considéraient que c'était le spectacle de Noël le plus authentique qu'ils n'ont jamais vu.
Extrait de "Chicken Soup for The Christian Soul"
Traduction Minh Le Quan.